Lettre ouverte : Moratoire sur les fermetures des bureaux de poste
J’ai adressé un courrier, co-signé par une vingtaine de mes collègues sénateurs du groupe socialiste et républicain, à Philippe Wahl, président-directeur général de la Poste, pour lui demander un moratoire sur la fermeture des bureaux de poste.
En effet, lors de son audition par la commission des affaires économiques, le constat de l’importance de la Poste et des missions de service public qu’elle assume dans nos territoires a été largement partagé. On parle trop peu du rôle en première ligne des postiers et des postières qui ont assuré depuis le début de la crise l’acheminement du courrier, des colis, le versement des allocations… Et pourtant ils ont assumé, malgré les risques pour leur santé, ces missions essentielles pour le lien social, et parfois vitales.
Nous ne voudrions pas que, « au jour d’après », cette dimension fondamentale de la présence postale soit oubliée : d’où cette idée de moratoire sur les fermetures et sur les réductions d’amplitudes horaires, qui permettra en outre aux nouvelles équipes municipales de ne pas avoir à se mobiliser sur ce front-là également.
L’intégralité du courrier adressé à Philippe Wahl :
Le mercredi 8 avril dernier, vous avez été auditionné par les bureaux des commissions des affaires économiques et de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, pour faire le point sur l’incidence de l’épidémie du Covid-19 sur l’activité des services postaux et bancaires dans le cadre des obligations de service public du groupe La Poste.
A l’instar de nos collègues qui ont participé à cette audition, nous tenons à saluer ici les postiers et postières dont la mobilisation permet de maintenir, en cette période de crise sanitaire sans précédent, ces services essentiels.
Les premières semaines de confinement ont néanmoins été marquées par des inégalités d’accès aux services postaux et bancaires, dont les contours dessinent une nette fracture territoriale : la priorité ayant été apparemment donnée à l’ouverture de bureaux dans les grands espaces urbains au détriment des petites centralités rurales et, au cœur même des villes, de certains quartiers.
Les engagements que vous avez pris pour y remédier sont à saluer, notamment l’augmentation du nombre de bureaux ouverts, avec un objectif de 5 000 à la fin du mois d’avril. Nous avons ainsi noté votre volonté de faire du rural « une priorité très importante » de ce dispositif, en sollicitant les élus locaux, en lien avec l’Association des Maires de France, pour trouver avec eux des solutions concertées.
Plus que jamais, à l’aune de cette crise inédite, il ressort que La Poste n’est pas une entreprise comme les autres. Les missions de service public (distribution du courrier, des colis, de la presse, accessibilité bancaire…) qu’elle remplit sont indispensables à la cohésion des territoires. Les usagers ont aussi pu apprécier les décisions fortes que vous avez prises de maintenir la livraison de médicaments et d’offrir la gratuité du service « Veiller sur mes parents ».
Mais pour que ces services publics soient accessibles à tous, la question du maillage territorial est fondamentale. Les carences constatées ces dernières semaines, dans les territoires dits « périphériques » moins bien desservis, ont prouvé par l’absurde à quel point la présence postale est une nécessité.
Prenant la mesure des difficultés que va traverser notre pays dans les mois à venir, le Gouvernement a commencé à suspendre des décisions conduisant à un reflux des services publics. Ainsi, le ministre de l’Éducation nationale, a annoncé qu’il n’y aurait pas de fermetures de classe dans les communes de moins de 5 000 habitants à la rentrée 2020, tandis que le ministre de la Santé évoquait une suspension des plans de restructuration dans les hôpitaux.
Aussi, dans le même ordre d’idée, nous vous proposons que le groupe La Poste décrète un moratoire sur les fermetures des bureaux de poste, ainsi que sur les réductions importantes d’amplitudes horaires, sur l’ensemble du territoire national durant l’année qui suivra la sortie du confinement.
Les nouvelles équipes municipales, qui vont entrer en fonction dans les prochains mois, pourront ainsi se consacrer pleinement à apporter des réponses aux crises économiques et sociales qui viennent, sans avoir à s’inquiéter de la fermeture – partielle ou totale – d’un bureau de poste, bien souvent dernier acteur de service public de la commune.
Les prochains mois pourront ainsi être l’occasion de repenser fondamentalement les rôles et missions de La Poste sur nos territoires, à la lumière des indicateurs fournis par cette crise, et plus uniquement des seuls taux de fréquentation ou nombre de colis délivrés qui ont conduit ces dernières années au recul de la présence postale dans notre pays.
Vous remerciant par avance pour la prise en compte de cette proposition, vous pourrez compter sur notre totale détermination et notre mobilisation en tant que parlementaires, pour accompagner une telle redéfinition de la stratégie nationale du service public postal.
Co-signataires de la lettre ouverte :
Viviane Artigalas, Maryvonne Blondin, Martial Bourquin, Roland Courteau, Yves Daudigny, Gilbert-Luc Devinaz, Sénateur du Nouveau Rhône et de la Métropole de Lyon, Alain Duran, Corinne Feret, Jean-luc Fichet, Martine Filleul, Nadine Grelet Certenais, Jean-Michel Houllegatte, Patrice Joly, Gisèle Jourda, Sénatrice de l’Aude, Rachel Mazuir, Michelle Meunier, Marie-pierre Monier, Marie-Françoise Pérol-Dumont, Sylvie Robert, Gilbert Roger, Laurence Rossignol et Nelly Tocqueville.
